La coupe du monde de football et les mouvements sociaux qui agitent le pays ont braqué les projecteurs sur le Brésil. Certains maux de la société brésilienne ont été mis en exergue suscitant de vieux réflexes dans des pays occidentaux souvent prompts à donner des leçons.

Pourtant, le régime issu de la Constitution de 1988, même imparfait, n’a rien à envier à celui en vigueur dans certaines « vieilles démocraties », notamment en France.

Chacun se souvient de la tragi-comédie autour du statut pénal du chef de l’État, et des circonstances dans lesquelles une solution lui conférant l’impunité durant son mandat avait été adoptée.

Plus récemment, une affaire impliquant un ancien président de la République rappelait qu’il existe en France une longue tradition de détournement de fonds publics, de trafics d’influence et de corruption. On y apprend que du fait de ses contacts, un avocat peut se déclarer confiant à propos d’une affaire pendante devant la Cour de cassation, plus haute juridiction française, «sauf si le droit finit par l’emporter». (cf. Nicolas Sarkozy le mobile du délit -Libération 18 mars 2014)

Au Brésil, l’article 86 de la Constitution prévoit la possibilité de poursuivre le président de la République devant la Cour suprême (STF) pour infraction de droit commun, après mise en accusation par les deux tiers de la chambre des députés.

En cas de crime dit « de responsabilité » dans l’exercice de ses fonctions, par exemple en cas d’atteinte à l’existence de l’Union, d’atteinte aux libertés, manquement à la probité, il peut être mis en accusation devant le Sénat.

Ces dispositions ont été tout de suite appliquées au premier président élu démocratiquement en 1990, Fernando Collor de Mello qui a démissionné la veille de sa destitution par le Sénat, ce qui n’a pas empêché ultérieurement des poursuites et sa condamnation.

Depuis lors, même si (comme en France) ces phénomènes sont loin d’avoir été éradiqués, une lutte sans merci a été menée au Brésil contre la corruption, les fraudes et autres trafics d’influence avec une amplification notable ces dernières années.

L’affaire dite du « mensalão » qui a vu la mise en cause de proches et des ministres influents de l’ancien président Luiz Inácio Lula da Silva, illustre bien cette volonté de combattre la délinquance en col blanc y compris dans les hautes sphères de l’Etat.

Elle donne lieu, encore aujourd’hui, à un bras de fer entre le monde politique et le pouvoir judiciaire, singulièrement l’intransigeant président du STF, Joaquim Barbosa premier noir ayant accédé à ces fonctions, grâce à Luiz Inácio Lula da Silva…

Concernant toujours la justice, on signalera également l’indépendance du ministère public et les pouvoirs qui lui sont accordés, question sur laquelle aucune réforme n’a pu aboutir dans la vieille démocratie qu’est la France.

En matière d’élaboration de la loi, l’avancée démocratique introduite par l’article 61 § 2 de la nouvelle Constitution relatif aux lois d’initiative populaire, mérite d’être citée.

En application de ce texte, dès lors qu’un projet de loi est présenté par 1% des électeurs représentant au moins cinq états, la chambre des députés est tenue de l’examiner.

La loi dite « ficha limpa » (casier propre) qui prévoit l’inégibilité pour 8 ans des personnes condamnées pour certaines infractions a été adoptée à la suite d’une campagne ayant recueilli plus d’ 1,3 millions de signatures. (cf. La loi "ficha limpa" est conforme à la Constitution http://www.cmichalon.org/article-99944605.html)

Ainsi donc, s’il est indéniable que du fait de nombreuses imperfections du texte et des pratiques auxquelles il a donné lieu, la nouvelle Constitution n’a pas permis de résoudre de graves problèmes structurels rencontrés au Brésil, les progrès accomplis, dans un pays qui n’est sorti de la dictature qu’en 1985, sont réels et même spectaculaires.

Après des symboles forts tels que l’arrivée au pouvoir d’un ouvrier métallurgiste, les mouvements qui agitent le pays depuis plus d’un an, sont incontestablement une manifestation de cette vitalité démocratique.

Les 25 ans de la Constitution brésilienne (2ème partie)